• à propos de « Entrer dans le paysage » (Georges Drano)

    Jacques Josse  

    « Aligner les mots / les pas et les pierres », Georges Drano

     

    Georges Drano ne se contente pas de regarder le paysage et d’évoquer ce qu’il ressent à son contact. Il a besoin de l’éprouver physiquement, d’y entrer avec son corps, de se frotter à sa présence, d’être acteur plutôt que spectateur et d’écouter ce qu’il a à lui dire.

     

    « Le chemin garde un œil ouvert
    il nous attend au prochain tournant
    nous mène où il veut, nous prend
    à la mesure de nos pas. »

    Il sait que l’échange ne peut se faire que dans la discrétion. Ces lieux familiers, qui se trouvent dans l’Hérault, plus précisément du côté de Sète et de Frontignan, qu’il arpente pas à pas, ont une histoire, une mémoire, des secrets qui ne se dévoilent pas facilement. Seul un passant singulier, un poète de son acabit, attentif à tout ce qui parle, tremble, vibre et frémit sur ces terres qu’il fréquente depuis longtemps, peut y découvrir autre chose qu’un simple décor. Il les décrit avec précision, à la manière d’un peintre qui travaille sur le motif, en y revenant sans relâche, en tournant autour, en multipliant les angles de vue.

    « Pour avancer il ne faut pas craindre
    de perdre son temps en s’éloignant
    du jour pour apprendre à errer parmi les mots
    qui tombent sans reconnaître
    leurs vaines beautés dans les obscures
    vallées qui se referment sur nos voix. »

    Les territoires dont il saisit les détails, les lumières, l’érosion, les remous, les marques du temps et des éléments, sont extrêmement variés. Entre le chemin qui ouvre le livre – et qui en donne le ton – et la route qui le clôt, se trouvent les vignes, les massifs montagneux, les étangs et la laisse de mer. Ces paysages l’accompagnent au quotidien. Il ne cesse de les interroger. Les découvre en permanence. Au fil des ans, son regard change, son corps aussi. Les émotions qu’il ressent au plus profond de son être bougent également. Ces choses-là, le paysage les lui révèle par l’intermédiaire du vent, de l’air, de l’ombre, de la lumière, du ciel, de la terre, des pierres, des arbres et de la poussière. Et Georges Drano nous les transmet à son tour. Avec clarté et simplicité. Dans des poèmes où son imaginaire a évidemment son mot à dire.


    Jacques Josse; Remue.net, 9 novembre 2019

     

    Georges Drano : Entrer dans le paysage, éditions Folle Avoine.

     


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